La Mouette déchainée
                             Réactions, enquêtes, déclarations...

                             













Toutes les news
c'est ici




Contact


Vos réactions, vos commentaires


Abonner un(e) ami(e)

Vous abonner

Qui sommes nous


18.05.2025 - N° 1.998
 4 minutes de lecture


Féminisation des filières scientifiques :
l’illusion de l’égalitarisme

Par Élodie Messéant


Diplômée en droit privé et en philosophie du droit, Élodie Messéant a travaillé dans
le domaine de l'investissement et des cryptomonnaies. Chargée d'études à l'IREF,
elle écrit régulièrement dans la presse depuis 2017..
.



Le 6 mai, la ministre de l’Éducation nationale Élisabeth Borne a annoncé
le lancement d’un plan ministériel Filles et maths.
Le but : qu’il y ait au moins 50 % de filles en mathématiques et en sciences
en classe de 4ème et en 3ème, et au moins 30 %
dans chaque classe préparatoire scientifique d’ici 2030.


Voici ce qu’elle propose : une sensibilisation de deux heures « aux biais de genre » réalisée par les chefs d’établissement, une formation pluriannuelle pour prévenir les « stéréotypes dans l’apprentissage des mathématiques », une « charte de lutte contre les stéréotypes » destinée aux professeurs… Bien qu’elle ne parle pas explicitement de quotas, Mme Borne s’aligne sur les recommandations de l’Inspection générale de l’éducation, qui préconise d’atteindre au moins 40 % de filles dans les filières STEM en 2040.

Plus les femmes sont libres, moins elles choisissent les sciences ou l’ingénierie

Les femmes sont-elles sous-représentées en sciences parce qu’on les décourage ? Rien ne permet de l’affirmer de façon générale. Dans les pays où l’égalité homme-femme est le plus aboutie – notamment les pays nordiques, Finlande, Suède ou Norvège –, les femmes sont proportionnellement moins nombreuses à s’orienter vers les filières scientifiques. C’est l’inverse dans des pays comme l’Arabie Saoudite, l’Iran ou la Syrie où les possibilités de carrières sont plus réduites pour les femmes : elles y sont plus attirées par les sciences ou l’ingénierie. Un paradoxe bien étayé dans la littérature scientifique, connu sous le nom de gender-equality paradox. Plus les sociétés offrent aux individus la possibilité de suivre leurs aspirations, plus les femmes ont tendance à s’orienter vers des disciplines centrées sur le lien humain (médecine, éducation, psychologie), et les hommes à préférer les domaines abstraits, mécaniques ou numériques.

Il semblerait donc que ces différences relèvent plus de choix personnels que de contrainte ou oppression systémique. Le fait que les femmes préfèrent la biologie à l’informatique ou la médecine à la robotique n’est pas un problème en soi, à moins de croire que les préférences individuelles peuvent se décréter par circulaire ministérielle ou que les hommes et les femmes sont interchangeables dans leurs intérêts… ce que les méta-analyses en psychologie sociale contredisent largement.

Un nivellement par le bas

On peut bien sûr atteindre 40 % de filles dans les classes préparatoires scientifiques – mais à quel prix ? Si la parité devient un objectif absolu, il faudra nécessairement revoir les critères d’entrée à la baisse, réduire les exigences dans les concours… voire éliminer des garçons ayant le niveau requis pour laisser la place à des filles qui ne l’ont pas. La logique des quotas prônés par des comités Théodule comme le Haut Conseil à l’Égalité (HCE) ne récompense plus les compétences ; elle impose une comptabilité sexuée.

En France, le niveau en mathématiques est préoccupant : la dernière enquête internationale TIMSS de 2023 montre que nos élèves sont parmi les plus mauvais d’Europe, ce qui est confirmé par le classement Pisa qui, lui, établit une comparaison avec les autres pays de l’OCDE. Les réformes successives de l’Éducation nationale n’ont rien arrangé : la réforme du lycée de Jean-Michel Blanquer en 2019, qui a supprimé les filières du baccalauréat général (L, ES, S) – là encore, pour lutter contre une hiérarchisation et donc une forme d’élitisme – a encore creusé l’écart entre les filles et les garçons en mathématiques. À peu près 1 garçon sur 2 conserve cette matière en terminale en 2021, contre seulement 1 fille sur 4. S’il y a une inégalité scolaire entre les sexes, c’est bien l’Éducation nationale, en tant qu’institution, qui l’entretient artificiellement et ce, bien avant la « société ». L’enjeu devrait être d’élever le niveau général en mathématiques, pas de vouloir une représentation quasiment identique entre filles et garçons.

L’égalité en droit n’implique pas l’égalité des résultats

Vouloir que 50 % des ingénieurs soient des femmes n’a pas de sens, pas plus que n’en aurait l’exigence d’un quota de 50 % d’hommes chez les sages-femmes. En 2022, près de 65 % des étudiants en médecine et en sciences de la vie, et plus de 70 % des étudiants en pharmacie, étaient des femmes. Peut-on parler d’une oppression systémique inversée ? De la même manière, les filières juridiques sont majoritairement suivies par des femmes. Faudrait-il contraindre les facultés de médecine ou les facultés de droit à recruter davantage de jeunes hommes pour corriger cette inégalité de fait ? La réalité est que les choix de carrière sont le fruit d’une infinité de facteurs individuels dont l’État n’a aucune maîtrise.

Sortir de la logique comptable

L’amélioration du niveau général en sciences ne semble pas faire partie des priorités d’Élisabeth Borne. Il est évidemment plus rentable politiquement de se limiter à des exercices de communication pour entretenir la rhétorique fallacieuse des associations féministes militantes et subventionnées. Les filles ont peut-être moins d’appétence, en moyenne, pour les matières scientifiques que les garçons, mais leurs performances sont meilleures à tous les étages du système éducatif : taux de réussite supérieur au diplôme national du brevet, taux de réussite supérieur dans toutes les voies du baccalauréat, plus grand nombre de diplômées au niveau master, en doctorat de santé…

Le plus important est de s’assurer que chaque élève a les moyens de s’orienter selon ses talents et ses aspirations réelles. « Forcer » les filles à aimer les maths ne les rendra pas plus libres ou indépendantes.

Transformer les filières scientifiques en laboratoires d’ingénierie sociale
ne peut que les affaiblir davantage.

______________








Qui sommes-nous ?

Nous écoutons, nous lisons, nous regardons...

C'est parfois un peu ardu, et les news peuvent demander de l'attention.
Mais elle sont souvent remarquables !


Nous vous proposons cet article afin d'élargir votre champ de réflexion et nourrir celle-ci.
Cela ne signifie pas forcément que nous approuvions la vision développée ici.


Nous ne sommes nullement engagés par les propos que l'auteur aurait pu tenir par ailleurs,
et encore moins par ceux qu'il pourrait tenir dans le futur.

Merci cependant de nous signaler par le formulaire de contact toute information concernant l'auteur
qui pourrait nuire à sa réputation.


Bien sûr, vos commentaires sont très attendus.


   L'équipe de La Mouette Déchaînée.