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07.03.2025 - N° 1.925
3 minutes de lecture

Où sont les Justes de Gaza ?

Par Michèle Mazel

Michèle Mazel est diplômée de Sciences-Po et licenciée en Droit,
et a été boursière Fullbright en science politique.
Pendant plus de trente ans, elle a accompagné de par le monde son mari, le diplomate Zvi Mazel, qui fut notamment ambassadeur d’Israël en Egypte, en Roumanie et en Suède.
Elle en a tiré la matière de nombreux ouvrages – thrillers et romans. Elle contribue régulièrement à plusieurs organes de presse..

Les années noires de la Seconde Guerre Mondiale ont été marquées
par des atrocités sans précédent.

Une occupation d’une brutalité inouïe, arrestations et exécutions sommaires, déportations. Traqués par les Allemands pressés de mettre au point leur infâme solution finale, les Juifs déjà victimes des lois raciales qui les chassaient de leurs emplois et les dépouillaient de leurs biens se cachaient tant bien que mal. Ils vivaient dans la hantise d’être découverts ou dénoncés.

Pourtant, dans cette atmosphère lourde de collaboration et de délation, il y a eu des hommes et des femmes qui n’ont pas hésité à prendre les risques les plus insensés pour venir en aide à des gens qu’ils ne connaissaient souvent même pas. Leur fournir de faux papiers. Les aider à passer en zone libre ou en Suisse. Prélever une partie de leurs maigres rations d’aliments pour nourrir ceux qu’ils cachaient chez eux au péril de leur vie. Ils sont hélas nombreux à avoir été déportés avec ceux qu’ils avaient voulu aider. Ce sont des centaines de milliers de Juifs qui ont été sauvés par ces héros tranquilles.

A peine créé, le jeune État d’Israël a eu à cœur de rendre hommage à ces « non-Juifs qui ont aidé des Juifs en péril dans des circonstances telles qu’elles impliquaient des risques pouvant aller jusqu’à la mort sans rechercher des avantages d’ordre matériel ou autre. » Près de 30.000 personnes se sont vues décerner à ce jour le titre de « Justes parmi les nations » par le parlement israélien. Des chiffres qui sont d’ailleurs largement en dessous de la réalité car il y a eu un bien plus grand nombre, beaucoup sont en effet restés anonymes car personne n’a soumis leur dossier au parlement israélien.

D’où venaient-ils, ces Justes ? Cinq pays en ont fourni les principaux contingents. Et ce ne sont pas ceux auxquels on pourrait penser. En tête, on trouve en effet la Pologne avec 7.232 Justes recensés, suivie par les Pays-Bas (5.982), la France (4.200), l’Ukraine (2.691) et enfin la Belgique (1.787). Qui étaient-ils ? Des hommes et des femmes ordinaires, retraités, fermiers, mais aussi des hommes d’église – catholiques, protestants ou orthodoxes – des directeurs de pensionnats, des médecins, des infirmiers, des fonctionnaires. Tous oubliant le danger qu’ils couraient, mus par la compassion ou un certain sens du devoir.

Hélas, des sentiments bien étrangers aux habitants de Gaza. Les pleurs d’un bébé, la détresse d’une mère, les cheveux blancs d’un vieux monsieur les ont laissés indifférents. Pendant de longs mois, il n’y a pas eu un seul Gazaoui prêt à tenter quelque chose. L’armée avait en vain offert une forte récompense et l’entrée en Israël pour qui aidera un captif à fuir. Trop risqué ? Alors peut-être faire passer un message ? Ils étaient nombreux à Gaza à avoir travaillé en Israël et à disposer encore d’un téléphone et de contacts. Moins dangereux mais efficace, laisser un papier avec de précieuses indications sur le chemin des soldats de Tsahal. Mais rien.

Où donc sont les Justes chez cette population qui se réclame
d’Allah le compatissant et le miséricordieux ?