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20.01.2025 - N° 1.879

Des chrétiens menacés d’extinction…

Par Abbé Alain René Arbez

Educateur spécialisé, curé de paroisses à Genève-centre,
relations avec le judaïsme Genève depuis 20 ans,
membre de la commission judéo-catholique des Evêques suisses (Lucerne).




D’année en année, de mois en mois, de jour en jour, les massacres
se succèdent implacablement au Proche Orient.

Des descendants des Assyro-Chaldéens, des Arméniens, sont les victimes particulièrement ciblées de l’acharnement islamiste. On se souvient de l’attaque de la cathédrale syriaque catholique de Bagdad, montrant clairement que l’islam radical, omniprésent dans toute la région, veut éradiquer totalement les chrétiens de cette terre où ils furent si nombreux et leurs communautés si prospères. Ces carnages interminables devraient nous inciter à mieux connaître le passé de cette région meurtrie, afin de comprendre à quel point son avenir reste obscurci par une culture de mort issue d’un islam aussi bien arabique que turc.

L’Irak est en effet un état de création récente, et actuellement un territoire en reconstruction : c’est une création des Occidentaux voulant répondre à la conjoncture du début du 20ème siècle, après l’effondrement de l’Empire ottoman et face à un nationalisme arabe en effervescence. Anglais et Français ont cherché à imposer une transition à la région en arbitrant la concurrence interne à l’islam entre musulmans turcs et arabes, mais cela s’est fait comme par hasard sur le dos des chrétiens. Le destin de la Syrie et du Liban fut remis entre les mains peu sûres des Occidentaux.

C’est donc au début du 20ème siècle – époque marquée par le génocide arménien et chaldéen perpétré par les Ottomans (près de 2 millions de victimes chrétiennes) – que fut créée la Jordanie sur 70% de l’ancienne Palestine historique, et qu’à l’instigation de Churchill, furent dessinées, sur des territoires assyro-chaldéens, arabes, kurdes et perses, les frontières de l’Iraq …

Si cela eut pour effet de calmer le jeu des revendications nationalistes arabes, au prix injuste de l’oubli des Kurdes et de leur ancien territoire, le Kurdistan, la communauté historique des chrétiens autochtones (assyro-chaldéens et Nestoriens) fut marginalisée et condamnée dès lors à une disparition progressive. Alors qu’il avait été formellement question que les instances internationales donnent naissance à un état assyro-chaldéen pour assurer la survie des autochtones chrétiens, la SDN en 1925 n’eut pas le courage de donner suite au projet. Le Hakkâri, bastion montagneux de repli chrétien séculairement harcelé par les Kurdes fut rattaché à la Turquie.

Ce problème spécifique de survie pour les chrétiens indigènes a commencé à  vrai dire à une époque déjà ancienne: car il y a environ vingt siècles, la Mésopotamie était un vaste territoire de riche civilisation héritée de l’antiquité. Une population nombreuse, composée de Juifs depuis l’exil à Babylone, et de Zoroastriens présents depuis longtemps, avait vu se développer sur ce terreau favorable de très nombreuses communautés chrétiennes dynamiques : Assyriens, Chaldéens, et Nestoriens, parlant tous une langue hébraïque semblable à celle de Jésus: l’araméen.

L’invasion brutale de l’islam au 7ème siècle dans cette région judéo-chrétienne florissante a (malgré quelques trop rares périodes tolérantes) provoqué le déclin inexorable des non-musulmans. En raison du djihad, fer de lance de la colonisation islamique, les chrétiens ainsi que les juifs disparurent progressivement au gré des persécutions, mises en esclavage, expropriations, conversions forcées, etc.

Pourtant, sous l’empire abbasside aux 8ème et 9ème siècles, Bagdad était devenue un centre islamique réputé. Mais on a souvent occulté le fait que  cette gloire revendiquée par l’islam était essentiellement due aux chrétiens locaux enrôlés par les califes et les sultans. C’est en raison de leurs connaissances bibliques (hébreu et grec) que les nestoriens furent appelés à traduire en arabe les œuvres majeures de la science et de la philosophie gréco-romaine. Humaïn al Hishaq, célèbre intellectuelchrétien, animait la « maison de la sagesse » du calife de Bagdad Al Mamoun. Le premier ouvrage d’ophtalmologie écrit en arabe le fut par le chrétien Youhanna Ibn Massawayh, médecin personnel d’Haroun al Rachid.

Mais les chrétiens, utilisés par les califes comme ressources d’appoint pour développer leur civilisation, étaient surtout des « dhimmi« , citoyens inférieurs pour lesquels la considération était très variable et aléatoire. De nombreux épisodes sanglants marquèrent cette région au fil des décennies, par exemple avec Tamerlan, qui enterra vivants des milliers de chrétiens, ou encore le féroce Sélim 1er et d’autres sultans qui massacrèrent massivement les populations chrétiennes de Mésopotamie occupée.

Ainsi, cette terre qui avait été spirituellement et culturellement rayonnante devint peu à peu, sous domination arabe puis turque, le plus grand champ de ruines de monastères et d’églises, et aussi le plus grand cimetière chrétien, du Moyen-Orient, selon l’expression de l’historien dominicain le père J.M. Fiey.

Qui aujourd’hui se souvient du rayonnement pluriséculaire de cette région du Moyen Orient? Les désastres successifs ont été totalement occultés par une arabisation forcée à l’époque de la dictature de Saddam Hussein, sous les yeux d’une Europe plus soucieuse de ses alliances commerciales et de ses moyens énergétiques, que des valeurs de solidarité humaniste et spirituelle, complètement laissées aux oubliettes.

Dans ce contexte, le tournant politique qui s’opère en Syrie depuis peu
laisse ouvertes toutes les possibilités, les meilleures et les pires,
sur fond de concurrence sunnite et chiite.


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