Traditionnellement, il est de coutume de croire aux miracles quand les fêtes de fin d'année commencent à envahir l'espace et la vie. Et puisque le plus grand nombre dit qu'il faut s'étourdir, alors on laisse nos craintes et nos angoisses pour après. On se répète, comme pour s'en convaincre, qu'anticiper les malheurs ne les a jamais empêchés, que « plaie d'argent n'est pas mortelle » et que l'être humain s'est toujours remis de tout, tout le temps.

Et… tout ça est vrai. Donc pas complètement inconscient. La résilience de l'humain est la seule certitude jamais démentie dans le temps, et la capacité de l'hominidé à se remettre des pires périodes reste une réalité que personne ne peut contredire.

Alors oui, la situation de la France est grave, et les lendemains nous verront déchanter devant une réalité qui n'est pas soluble dans les coupes de champagnes de la Saint-Sylvestre. Que notre pays doive résorber un déficit abyssal n'est pas chose réjouissante. Oui, la Syrie de demain nous promet un nouvel enfer, au moins pour les femmes, et l'Afghanistan finira par tuer les siennes, après les avoir emmurées vivantes et réduites au silence absolu dans une relative indifférence mondiale. Oui, l'Iran n'est toujours pas libéré de la tyrannie d'un régime qui pend un opposant toutes les cinq heures et, oui, les Etats-Unis verront en 2025 un complotiste sexiste et conservateur diriger le pays. Oui, plus de 100t otages sont encore prisonniers des terroristes islamistes du Hamas, oui, le 7 janvier cela fera dix ans que la rédaction de Charlie Hebdo fut décimée par un autre terroriste mais le même islamisme, et beaucoup n'en ont tiré aucune leçon. Oui, Vladimir Poutine subit des revers, mais aussi des victoires, et sa fin d'année, c'est avec un autre tyran, Bachar Al-Assad, qu'il la vivra. Et oui, l'Ukraine verra peu de sapins de Noël égayer ses foyers cette année. Tant de choses encore, oui.

Mais le Rwanda, qui vit advenir le dernier génocide de ce siècle, s'est reconstruit en trente ans, et les ennemis d'hier ont appris à faire de nouveau société, ensemble. Un Covid que personne ne pouvait anticiper et plusieurs semaines de confinement ont vu la nature reprendre ses droits sur une planète qui la voyait pourtant agoniser, preuve que rien n'est désespéré. Les athlètes paralympiques ont fait des splendeurs avec les handicaps de leur vie. Les juifs européens diminués de 60% au lendemain de la Seconde Guerre mondiale ont fait Israël, la seule démocratie du Moyen-Orient. La France s'est relevée de la Saint-Barthélemy, de la Révolution, de la collaboration, de la peine de mort, de Charlie, du Bataclan…

Nous nous remettrons de l'instant, de sa médiocrité et de sa gravité, des incertitudes qu'il charrie pour le futur et des gâchis qu'il raconte au présent.