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24.10.2023 - N° 1.429

Malgré l’inflation, le gouvernement ne doit pas imposer
aux entreprises des hausses de salaires

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Par Henry Bonner

Après un master de physique aux Etats-Unis, Henry Bonner a  travaillé dans la finance pour la société Sprott, spécialisée dans les minerais et les métaux précieux. Il a ensuite travaillé pour différentes boîtes d'éditions financières, à Londres, en Suisse, et à Paris, où il a écrit sur l'économie et l'actualité financière.



Face à la dévaluation monétaire, le gouvernement tente de naviguer entre soutien économique et contrôle des salaires. Mais cette stratégie cache plus de méfaits que de bénéfices pour les entreprises et les salariés.

À l’occasion d’une conférence avec les syndicats, pour « avancer sur le lien entre productivité, création de valeur et salaires », le gouvernement donne les apparences d’une réponse aux hausses de prix.

Les autorités créent plus d’argent via les déficits et les politiques de soutien aux débiteurs, via des baisses de taux d’intérêt. En dépit des apparences, la banque centrale maintient le taux de dépôt sous le rythme de la progression des prix, une forme d’incitation à la création d’argent.

Pourtant, selon les dirigeants et la presse, les hausses de prix n’ont rien à voir avec les politiques de dépense. Au contraire, disent-ils, le gouvernement mène une lutte pour le pouvoir d’achat !

Ils affirment que l’industrie de l’alimentaire – les entreprises Nestlé ou Danone, par exemple – crée les hausses de prix en rayons. Les producteurs de carburants, comme Total, gagnent trop d’argent, et augmentent le coût de la vie.

Le gouvernement évoque des aides à la population contre les hausses de taux d’intérêt.

Les ministres parlent d’aides à l’emprunt pour l’achat d’un logement, par exemple. L’accès à davantage de crédits fournit une source de pouvoir d’achat.

Responsabilité des patrons

Pour les salariés, la perte de pouvoir d’achat provient des employeurs, disent-ils. Les ministres appellent à plus de générosité des patrons.

Le ministre du Travail reproche un retard dans les augmentations de salaires en proportion à la hausse du Smic :

« On va rendre publiques ces branches, on va les recevoir dans les jours qui viennent, leur rappeler les règles du jeu. Le 1er juin, si la situation ne s’est pas améliorée, nous proposerons ce projet de loi. »

Le ministre de l’Économie évoque des mesures de redistribution aux employés, via des règles sur les rachats de parts :

« Quand une entreprise a de quoi racheter des actions, elle sera obligée de rouvrir les accords d’intéressement et de participation et de donner plus aux salariés ».

La presse reprend le refrain des dirigeants. Emmanuelle Souffi, chroniqueuse chez BFM, affirme par exemple :

« L’État est récemment passé à la rescousse [contre les hausses de prix], avec des chèques-carburant, des chèques anti-inflation, des ristournes fiscales, des ristournes fiscales, des boucliers tarifaires, mais aussi en mettant la pression sur les employeurs, qui ont la fâcheuse tendance à jouer les Picsou. »

Salariés et entreprises, victimes d’une dévaluation

La dévaluation de la devise mène à la confusion chez les entreprises et salariés.

En effet, les hausses de prix et des salaires touchent des segments de l’économie avant d’autres. De plus, personne ne sait la part de la dévaluation de la devise dans les variations de prix.

Par exemple, les prix pour les matériaux de construction, ou les matières premières pour l’agro-alimentaire, baissent à présent par rapport aux extrêmes.

Personne ne sait par avance sur quelle durée de temps, et jusqu’à quel point les prix peuvent retrouver la normale.

Les entreprises ne savent pas quelle part du surcoût pour la production provient d’effets de passage – perturbations des confinements ou guerres -, ou d’effets sur la durée, en raison de l’injection d’argent. Les sociétés ne savent pas non plus si les hausses de prix proviennent d’effets particuliers à des secteurs – le manque de bois ou d’engrais, par exemple – ou en raison d’un effet de la dévaluation sur l’ensemble de l’économie.

En général, une hausse de prix pour un type de bien ou service signale une hausse de la demande de la part des consommateurs, et encourage plus de production dans le domaine. Or, avec la dévaluation de la devise, les prix peuvent grimper sans rapport avec la demande du marché.

Ainsi, les prix induisent en erreur : ils fournissent l’impression d’un changement dans la quantité d’offre ou de demande. Dans une dévaluation, la hausse du prix d’un produit survient parfois malgré une baisse de la demande !

Déboires de l’effet Cantillon

Le contemporain de John Law, Richard Cantillon, décrit la raison pour la confusion dans les signaux de prix :

« Une injection de monnaie dans l’économie exerce un effet progressif et différencié sur les prix au fur et à mesure que la monnaie se propage par les échanges à partir du point où elle a été injectée. »

Les prix transmettent une information sur la situation de l’offre et de la demande pour un bien ou service. Or, avec la dévaluation de la devise, les prix changent sans rapport avec la quantité de biens, ou les préférences des consommateurs.

Le marché – producteurs, consommateurs, financiers, actionnaires – perd une partie du signal des prix. Les acteurs de l’économie n’ont pas de certitude sur la réalité de la demande pour un bien, ni pour l’évolution des coûts de production à l’avenir. Personne ne connaît la part de la dévaluation de la devise dans les variations de prix pour un secteur ou type de bien.

Les entreprises n’ont pas non plus de certitude sur la réponse des consommateurs face aux hausses de prix. En principe, les prix et salaires suivent tôt ou tard le rythme moyen de la hausse. Dans l’immédiat, les hausses de prix peuvent réduire la demande pour certains types de biens. Un producteur peut augmenter ses salaires au rythme de l’évolution des prix dans l’économie. Pourtant, il risque un manque d’achats de la part des consommateurs, face aux prix plus élevés en rayons.

Lors d’une dévaluation, la confusion induit des erreurs chez les producteurs et coûte du pouvoir d’achat aux ménages. En raison du décrochage entre l’évolution des prix et la réalité de l’offre et de la demande, elle réduit l’efficacité des marchés.

Une voix de la raison

Lundi, les syndicats en réunion avec le gouvernement ont exigé des indexations des salaires, en guise de protection des salariés. Une voix de la raison provient du journal Alternatives Économiques, d’habitude une source d’appels à l’intervention. Une tribune du journal cette semaine conseille la prudence dans les mesures.

Christian Chavagneux, l’auteur de la tribune, rappelle le problème de l’indexation des salaires dans les années 1970 :

« La première erreur serait de mettre en place une indexation automatique
de tous les salaires sur le coût de la vie. »


La dévaluation de la devise réduit en effet le pouvoir d’achat des entreprises (en l’absence de hausses de prix pour les produits et services) :

« Les entreprises ne peuvent pas toutes se le permettre, au risque de plomber leurs comptes et la pérennité de l’emploi. L’expérience nous l’a montré, lorsque la France a connu une longue période d’indexation, le partage de la valeur ajoutée a largement bénéficié aux salariés et évolué trop défavorablement pour les entreprises. »

Comme le remarque Cantillon, au bout d’un temps l’injection d’argent mène à l’augmentation des prix partout dans l’économie. Pourtant, la hausse n’a pas lieu à égalité pour tous. Les revenus de secteurs ou d’entreprises traînent, parfois pour des années, derrière la hausse des prix dans l’économie.

La protection des pouvoirs d’achat requiert non une indexation, ni des mesures de pression, mais la fin de la création d’argent.

Importance de la liberté de contrat

La tribune met aussi en valeur – sans doute par accident – la nécessité de la liberté des entreprises, en particulier en matière d’accords et contrats avec les salariés. Comme l’explique M. Chavagneux, le fonctionnement d’une entreprise comporte beaucoup de flou et d’incertitude sur la contribution de chacun aux ventes ou aux bénéfices.

Il y voit une critique de la rémunération au mérite :

« Quand les numéros d’Alternatives Économiques réalisent de grosses ventes, est-ce du fait de ceux qui ont choisi la couverture ? De la qualité des articles ? De leur mise en page ? De la stratégie publicitaire ? Des relais réussis sur les réseaux sociaux ? D’autres éléments… ? Bref, qui mérite d’être augmenté ?
Il est impossible de répondre à cette question. »


En effet, personne n’a de réponse à la question. Pourtant, l’auteur croit tout de même à l’implication des dirigeants dans la fixation de salaires.

Ils ont peu de connaissance des détails de l’activité d’une entreprise quelconque. De plus, ils ne jouent pas leur peau. Ils ne souffrent pas de revers en cas d’erreur.

Néanmoins, l’auteur croit plus aux réponses de bureaucrates et syndicats qu’en l’avis de patrons :

« Le salaire n’est pas un prix du travail mais un contrat social
qui s’inscrit dans le collectif »
.


Dans une entreprise, les salariés et patrons négocient et trouvent des accords. Parfois, ils font des erreurs ou gâchent des opportunités ou talents.

Pourtant, la liberté de contrat entre les employeurs et salariés offre la seule méthode pour la fixation des salaires, sans l’imposition de la volonté d’un tiers
– gouvernement ou syndicats -, en quête de popularité ou gain d’influence,
et irresponsable en cas d’erreur.


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