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04.04.2023 - N° 1.247

Déconventionnement, effet boule de neige ?

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Par Patrick de Casanove

Président du Cercle Frédéric Bastiat, Patrick de Casanove est docteur en médecine.
Il exerce à Ondres, commune dont il a été maire de 1995 à 2001.
Il est l'auteur de "Sécu, comment faire mieux" (éditions Tatamis).





L’échec des négociations sur la convention médicale peut offrir une opportunité pour une véritable réforme de notre système de protection sociale. 

La France entière parle de la réforme des retraites. Macron la présente comme l’œuvre maîtresse de son second quinquennat.

En vérité ce n’est qu’une succession d’arbitrages au sein de la spoliation légale : qui voler, au profit de qui, jusqu’à quand. Bref quelques mesures paramétriques dont la disposition essentielle est le recul de l’âge de la retraite et l’allongement de la durée de cotisation.

C’est insuffisant pour sauver le pays mais assez pour aggraver les tensions qui règnent dans une France qui se disloque. La partie n’est pas finie, moins parce que la contestation continue, que parce que dans quelques années il faudra de nouveau modifier les paramètres pour tenir compte de la situation qui existera alors.

C’est en effet le régime par répartition lui-même qui ne fonctionne pas. Pourtant, l’objectif officiel est de le sauver, il n’est pas de servir des retraites décentes et pérennes aux Français.

C’est le même raisonnement que pour la Sécurité sociale. Le but de chaque réforme est de la sauver, pas de permettre que chacun reçoive, tout le temps, en toute circonstance, les soins dont il a besoin.

Le combat de médecins pour leur liberté

À ce propos, il se passe actuellement un petit quelque chose dont on ne parle pas mais qui, bien mené pourrait changer la France en profondeur en faisant sauter un des verrous essentiels de la spoliation légale. Il s’agit du combat des médecins pour leur liberté.

L’échec des négociations sur la convention médicale peut offrir une opportunité pour une véritable réforme de notre système de protection sociale.

Un certain nombre de médecins libéraux, en particulier des généralistes, envisagent très sérieusement de se déconventionner. Des milliers de médecins brandissent cette menace. Le mouvement « Médecins pour demain » est en pointe, soutenu par l’UFML qui a organisé les Assises du déconventionnement.

Pour l’instant 1347 lettres d’intention ont été reçues par ce syndicat. C’est peu.

Ce cheminement intellectuel vers le hors Sécu démontre que ces médecins ont compris qu’ils ne survivront que libres. Il n’est de secret pour personne qu’en France la médecine libérale n’a de libéral que le nom.

Pour mener à bien ce processus ils devront briser le sacro-saint tabou : « la Sécurité sociale monopole public, modèle social que le monde entier nous envie. »

En 1945, l’objectif de la Sécurité sociale était de garantir les travailleurs contre l’ensemble des risques sociaux.

« Les ordonnances des 4 et 19 octobre 1945 créent une organisation de la Sécurité sociale qui fusionne toutes les anciennes assurances (maladie, retraite…) et garantit à chacun qu’en toutes circonstances il disposera des moyens nécessaires pour assurer sa subsistance et celle de sa famille dans des conditions décentes. »

Aujourd’hui ce que les Français appellent affectueusement « la Sécu », concerne la branche maladie.

Pour certains, elle a solvabilisé la demande. Ce qui veut dire que les médecins ne vivraient que grâce à la Sécu. Or les médecins vivent grâce à leurs talents, leur humanité et aux services qu’ils rendent à leurs patients. C’est une exigence de qualité. Cela deviendra patent en cas de déconventionnement.

Officiellement la Sécu permet à chacun d’être soigné sans que l’argent constitue un obstacle :

« La Sécu repose sur un contrat implicite qui lie tous les citoyens : chacun y contribue selon ses moyens et en bénéficie selon ses besoins. ».

En fait, tout le monde peut se faire soigner s’il y a abondance de soins et prospérité économique. La France a quitté les chemins de l’abondance et de la prospérité depuis belle lurette donc… il y a pénurie de soins.

La Sécu ne remplit pas ses missions

Malgré les sommes dépensées dans le système de santé, soit 226,7 milliards d’euros en 2021, malgré ses financements multiples, les besoins ne sont pas couverts. Il y a mal-investissement, c’est-à-dire une mauvaise affectation des ressources parce que nous sommes dans un système d’économie administrée.

La situation du système sanitaire français est dramatique. Les pénuries sont partout. Pénuries de médecins, de soignants au sens large, de médicaments, d’équipements, de soins disponibles… Aucun territoire n’est épargné. Aucun secteur n’est épargné. Les fermetures d’établissements de soins et de lits continuent.

Comme si cela ne suffisait pas, le gouvernement est allé jusqu’à interdire aux Français d’être soignés par les généralistes, ou les priver de soins lors des Plans blancs, au prétexte des covid.

Officiellement la médecine est gratuite. En pratique elle ne l’est pas puisque les Français ont prépayé leurs soins par les prélèvements obligatoires. Et malgré cela ils peuvent en être privés lorsqu’ils en ont besoin.

Elle n’est pas gratuite au point de vue financier, tout n’est pas remboursé. Elle ne l’est pas parce que le temps d’attente est un prix à payer. Elle ne l’est pas parce que la détérioration des prestations sanitaires est aussi un prix à payer.

La régulation de cette pénurie se fait par la file d’attente et les déremboursements. Aujourd’hui en France, la médecine est devenue pour beaucoup une médecine de réseaux et de relations.

Des réformes de fond pour la liberté

Avec le déconventionnement, les médecins ont l’occasion de provoquer la remise à plat du système.

En l’état actuel, les conséquences pour les médecins comme pour les patients seraient importantes. Pour que ce soit un succès et aboutisse à un système de santé performant et pérenne il faut aller au bout de ce que l’on appelle le déconventionnement. C’est en réalité un retour à la liberté de choix autant pour les médecins que pour les patients. C’est un retour à l’échange libre de services entre le médecin et son patient. C’est le retour du colloque singulier sans ingérence de l’État.

Pour que chacun puisse choisir, soignants comme soignés, il faut que chacun en ait les moyens. Les médecins doivent comprendre, expliquer et demander que le déconventionnement s’accompagne de réformes de fond, de réformes systémiques.

Le salaire complet

Chacun sait aujourd’hui que la somme qui figure en bas du bulletin de salaire et qui est perçue par le salarié, n’est pas son salaire réel. Certains croient encore à la fiction des charges patronales et salariales. Les charges patronales sont constituées de richesses créées par le travail du salarié, elles lui appartiennent. Ce qui figure en bas de la fiche de paye c’est ce qui lui reste quand l’État a tout prélevé, retraites, protection sociale, chômage et autres charges, y compris l’impôt sur le revenu. Il faut rendre au salarié la totalité de son salaire.

L’équivalent pour un non salarié c’est le chiffre d’affaires diminué des frais nécessaires à l’exercice de sa profession. Pour les pensionnés c’est l’intégralité des pensions.

Peu d’impôts

Il faut éviter que l’État reprenne par les prélèvements ce qu’il rend avec le salaire complet. Un seul impôt faible et proportionnel serait l’idéal. Peu d’impôts en quantité et qualité sera déjà un grand progrès. Il n’y aura plus de prélèvement à la source.

Libre choix de l’assurance maladie

Grâce à la disposition de l’intégralité de leurs revenus les Français pourront abonder un compte épargne santé pour prendre en charge leurs soins jusqu’à un certain montant. Ce compte sera transmissible. Ils auront la liberté de choisir leur organisme d’assurance maladie pour les frais au-delà du compte épargne santé. La Sécu sera mise en concurrence avec les assurances et mutuelles. Chacun n’aura qu’un prestataire choisi, au lieu de deux aujourd’hui. (un imposé : la Sécu, et un choisi : la mutuelle). Les prestations seront garanties par contrat. Aujourd’hui rien ne garantit les prestations de la Sécu. Elles changent au gré des politiques et à leur profit. La définition d’un panier de soins rassurera tout le monde. Il n’y aura plus de reste à charge. C’est un retour à la prévoyance et à la responsabilité personnelle.

Filet de sécurité

Prévu pour les personnes en difficulté et financé par l’impôt, parce qu’il s’agit là de solidarité nationale. Il pourrait prendre la forme d’un « chèque assurance santé », parce qu’être pauvre n’ôte pas le bon sens et n’empêche pas de pouvoir choisir pertinemment. L’accès aux soins pour tous sera certain.

Nouvelle protection sociale

Ces bases acquises, il sera possible de réformer réellement les retraites puisque les Français disposeront de l’intégralité de leurs revenus. Cela leur ouvrira la possibilité de capitaliser pour leur retraite. Grâce à la capitalisation, chacun pourra choisir ses organismes de retraites et définir ce qu’il souhaite en durée de cotisation, âge de départ etc. en fonction de critères qui lui sont propres. Une retraite à la carte donc…

Réduire le périmètre de l’État

Ce sont ces mesures d’accompagnement qui permettront le succès du déconventionnement et feront sauter le verrou de la spoliation légale que constitue notre système de protection sociale. Tout cela entraînera une véritable régénération du système politico-social français, aujourd’hui en ruines.

Les réformes pourront continuer :

L’Éducation nationale

Elle ferait bien de redevenir instruction publique. Elle proposera les établissements, havre de paix, en libre choix, leurs responsables choisiront leurs équipes et vice-versa, les programmes seront libres autour d’un socle de transmission des savoirs, la discipline sera respectée, la neutralité sera assurée.

L’entreprise

Elle n’aura plus à supporter le carcan de multiples prélèvements et règlements obligatoires, étouffants et multiples. Les charges disparues l’URSSAF disparaîtra.

L’État

Il sera concentré sur ses fonctions régaliennes, justice, sécurité des biens, des personnes, de la patrie. Il cessera enfin de régenter la vie des gens, ce qui est une revendication des opposants à la réforme des retraite Macron.

L’harmonie sociale

Il serait judicieux de considérer la soif de déconventionnement comme un signal de basse intensité sur le délabrement de la France. Il serait judicieux d’en profiter pour analyser correctement la situation du pays et prendre les mesures adéquates pour remettre la France sur les rails.

À partir de ce petit point de départ, le déconventionnement des médecins, les Français pourraient recouvrer la liberté d’échanger des services, la responsabilité de leur projet de vie. La France renouerait avec la prospérité et l’abondance. Ce qui mettrait fin au gouvernement par la division, la peur et le chaos, voulus par des politiciens pompiers pyromanes. L’harmonie sociale serait restaurée. Petite cause, grands effets.

Relisons Frédéric Bastiat :

« Dans l’isolement, nos besoins surpassent nos facultés. Dans l’état social, nos facultés surpassent nos besoins. […] L’homme a d’autant plus de chances de prospérer qu’il est dans un milieu plus prospère […] Car, il n’en faut pas douter, c’est là qu’est la raison de décider entre l’Organisation naturelle et les Organisations artificielles ; c’est là, exclusivement là, qu’est le problème social. Si la prospérité de tous est la condition de la prospérité de chacun, nous pouvons nous fier non-seulement à la puissance économique de l’échange libre, mais encore à sa force morale […]La vraie puissance de l’échange […] Ce n’est pas […] qu’il implique deux gains, parce que chacune des parties contractantes estime plus ce qu’elle reçoit que ce qu’elle donne. Ce n’est pas non plus que chacune d’elle cède du superflu pour acquérir du nécessaire.

C’est tout simplement que, lorsqu’un homme dit à un autre: « Ne fais que ceci, je ne ferai que cela, et nous partagerons », il y a meilleur emploi du travail, des facultés, des agents naturels, des capitaux, et, par conséquent, il y a plus à partager. »
Échange (1850)



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