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10.06.2022
- N° 951

Conseil national de la refondation,
le nouveau « machin » de Macron

 

Dernier commentaire paru :  JC écrit le 02 juin.
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Par Frédéric Mas


Frédéric Mas est journaliste. Après des études de droit et de sciences politiques, il a obtenu un doctorat en philosophie politique (Sorbonne-Universités). Il s'intéresse en particulier à la politique internationale, aux théories économiques contemporaines et à la vie des idées. Il écrit également pour Atlantico.



Le « nouveau conseil » du gouvernement Macron II ressemble furieusement à certains autres « coups de comm’ » du gouvernement Macron I.

Emmanuel Macron a annoncé la création d’un « Conseil national de la refondation » dans un entretien accordé à plusieurs organes de la presse régionale vendredi soir dernier en conclusion des législatives. Son but serait de rassembler les « forces politiques, économiques, sociales, associatives », et lui sera associé un aréopage de citoyens tirés au sort, interrogés sur les grands sujets du moment aux yeux de l’exécutif, c’est-à-dire le pouvoir d’achat, les institutions, l’écologie ou les retraites.

L’économie à genoux

Reconnaissons d’abord que cet hommage appuyé de l’exécutif au Conseil national de la Résistance de 1943 (CNR) sonne comme un aveu. Le CNR visait à coordonner la résistance française en temps de guerre, et a accouché d’un programme politique antilibéral visant à la reconstruction d’un pays en ruines. La guerre de Macron contre le virus durant la crise sanitaire s’est surtout traduite par l’acharnement de l’État bureaucratique contre sa propre population. Multipliant les mesures d’exception, les confinements, les couvre-feux et les fermetures autoritaires des commerces divers et variés sur critères arbitraires, le gouvernement a lourdement endommagé le système de production national, en particulier dans le domaine du tertiaire. Résultat, pour éviter l’effondrement brutal de l’économie nationale, Emmanuel Macron a choisi de distribuer l’argent public, faisant exploser la dette publique comme jamais depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Le programme issu du CNR était hier sous influence du PCF, aujourd’hui, c’est la NUPES qui mène la danse. Pierre Rosanvallon rappelle dans son ouvrage sur l’État en France que l’immédiat après-guerre fut un tournant de l’histoire économique du pays. Porté par l’anticapitalisme des principaux mouvements de résistance français, la planification et la nationalisation ont été les pierres angulaires d’un programme « proto-communiste » visant à faire de l’État le principal agent d’impulsion dans la reconstruction du pays1. Seulement, il est difficile d’évaluer le rôle de cette impulsion étatiste dans la prospérité des Trente glorieuses, comme l’ont très bien vu Thesmar et Landier dans Le grand méchant marché : la planification a-t-elle été à l’origine de la croissance sans précédent du pays, ou la croissance sans précédent du pays a-t-elle permis d’absorber le gaspillage économique organisé par le pilotage politique de la production nationale ? Nous serions tentés de trancher dans le sens de la seconde interrogation.

Pour ce qui est du cas présent, le nouveau gouvernement a choisi de mimer le CNR mais en acceptant comme influence non plus le PCF mais son équivalent parodique, la NUPES, qui elle aussi défend bec et ongles la planification (écologique) et la socialisation de l’économie. Mais en dévoilant son nouveau projet, la Macronie envoie un message clair à ses rivaux : la planification oui, mais avec nous aux manettes (et donc sans vous).

Une stratégie de diversion éprouvée

Le « nouveau conseil » du gouvernement Macron II ressemble furieusement à certains autres « coups de comm’ » du gouvernement Macron I.

On se souvient que pour les retraites ou pour le climat, l’exécutif a pu tirer de son chapeau ces « comités de citoyens » pour donner à ses décisions unilatérales une apparence de démocratie directe. Fidèle à une manière de gouverner qui enchaîne tactiques de diversion sur tactiques de diversion, le locataire de l’Élysée s’est fait une spécialité d’enjamber les moments démocratiques qui rythment la vie publique nationale en créant de toutes pièces des « machins » visant à diluer la responsabilité effective du gouvernement ou de transformer ses défaites politiques en opérations de communication réussies. Ici, le gouvernement anticipe sa victoire à la Pyrrhus sur une extrême gauche mélenchoniste en ascension dangereuse, et tente d’étouffer médiatiquement sa dynamique favorable dans les médias.

Rappelons que si le tirage au sort est le principe moteur de la démocratie originelle, elle n’est légitime qu’en démocratie directe entre citoyens égaux2. En démocratie représentative, c’est l’élection qui s’est substituée à lui afin de désigner les représentants du peuple légitimes à contrôler et limiter l’arbitraire d’un exécutif normalement cantonné à la bonne application des lois. Surtout, l’exécutif est clairement séparé du législatif, conformément au principe de séparation des pouvoirs.

En brouillant les cartes pour minorer la légitimité du suffrage sorti des urnes, Macron démontre une nouvelle fois que son autoritarisme technocratique est aux antipodes de l’esprit libéral du gouvernement représentatif.

  1. Pierre Rosanvallon, L’État en France de 1789 à nos jours, Seuil, 1990.
  2. Bernard Manin, Principes du gouvernement représentatif, Calmann-Lévy, 1995.


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