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26.05.2022
- N° 936

Le calcul du pouvoir d’achat par l’Insee a-t-il un sens ?

 

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Par Frédéric Mas


Frédéric Mas est journaliste. Après des études de droit et de sciences politiques, il a obtenu un doctorat en philosophie politique (Sorbonne-Universités). Il s'intéresse en particulier à la politique internationale, aux théories économiques contemporaines et à la vie des idées. Il écrit également pour Atlantico.



Les statistiques publiques occultent donc la dégringolade du niveau de vie des Français, sujet autrement plus important que la « montée des inégalités » toute relative dans notre pays.

Le pouvoir d’achat, qui a été au cœur de la campagne présidentielle, est-il un indicateur statistique fiable ? Deux auteurs, l’un plutôt inspiré par Marx et l’autre par Bastiat, se rejoignent pour critiquer la manière dont l’Insee calcule le niveau de vie des Français. Dans son essai sur la Lutte des classes en France au XXIe siècle Emmanuel Todd reprend la critique adressée par l’économiste libéral Philippe Herlin au mode de calcul du pouvoir d’achat des Français formulé par le célèbre institut étatique1.

L’effet qualité

Le calcul du pouvoir d’achat se fait en fonction de l’inflation, ou indice des prix, et sur des critères produits par l’Insee lui-même. Todd écrit que Philippe Herlin évoque longuement « l’effet qualité » qui tend à minorer l’augmentation des prix :

Lorsque le prix d’un produit augmente, pour peu que ce produit présente quelques améliorations, la hausse est… effacée. Herlin prend l’exemple du nouvel iPad d’Apple [qui] coûte le même prix que l’ancien mais -attention- comme il est plus puissant, que le modèle précédent, l’Insee considère que vous en avez pour votre argent et inscrit dans sa base un prix en baisse, inférieur au prix affiché […] Sur le long terme, poursuit Herlin, « l’effet qualité donne des résultats aberrants » : ainsi « un ordinateur qui valait environ 6500 francs (1000 euros pour simplifier) en 1996 ne vaudrait plus aujourd’hui que 50 euros ! » Il est bien entendu impossible, dans la vie réelle, de se procurer un ordinateur neuf (et même d’occasion) à un prix pareil. »

Todd observe également que les savants calculs de l’Insee aboutissent à la non prise en compte du coût du logement dans son calcul d’indice des prix : « … dans son calcul de l’indice des prix, le coût des loyers vaut pour 6 % du budget total des ménages et le coût des remboursements bancaires (que l’immense majorité des gens est obligée de contracter pour s’acheter un logement) pour 0 % ! »

En d’autres termes, la part de revenu consacrée au logement n’existe pas au regard du pouvoir d’achat circonscrit par l’Insee. Or, rappelons ici que sur 20 ans, le prix de l’immobilier a explosé, augmentant de 153 % entre 1999 et 2018 selon l’indice des notaires… et de l’Insee. En 2018, les Français y consacraient 24,3 % de leur budget impactant directement leur capacité d’épargne.

Dégringolade réelle du pouvoir d’achat

Seulement, toujours selon l’Insee, acheter un bien immobilier relève du placement et non de la consommation courante. Même si un tiers du budget des ménages y est consacré, il n’apparaît donc pas dans le calcul du pouvoir d’achat. Toujours à la suite de Philippe Herlin, Emmanuel Todd en conclut que la suppression de l’effet qualité et l’ajout du coût du logement ferait gagner à l’inflation au moins 1 à 2 % par an, et donc ferait reculer substantiellement le pouvoir d’achat. Et ça, ça n’apparaît donc pas dans le fameux pouvoir d’achat.

Les statistiques publiques occultent donc la dégringolade du niveau de vie des Français, sujet autrement plus important que la « montée des inégalités » toute relative dans notre pays.

Et ce sont ces statistiques économiques que nos édiles technocratiques fétichisent. Mais peut-on vraiment réformer le pays quand les indicateurs ne renvoient à aucune réalité ?

1. Philippe Herlin, Pouvoir d’achat, Le grand mensonge, Paris, Eyrolles, 2018.


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