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08.04.2022
- N° 889

Élections : j’ai peur de l’isoloir

 

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Par Karl Eychenne


Karl Eychenne est chercheur chez Oblomov & Bartleby.



Il y a la peur du noir, des fantômes, des canards, du papier toilette,
il existe toutes sortes de peurs.
Mais moi j’ai peur de l’isoloir.


Un jour on créa l’isoloir. Avec les toilettes, c’est le seul endroit où il n’est pas permis de voir par-dessus votre épaule ce que vous faites. Mais l’isoloir est plus que cela. À la différence des toilettes, l’isoloir n’est pas le lieu d’une délivrance, mais de l’espérance. Il est le lieu de tous les possibles, du changement ou pas. L’isoloir est bien le plus court chemin entre le réel et l’imaginaire.

Et c’est bien là le sujet : le pouvoir incommensurable de mon bulletin de vote sur le cours des choses. Et cette terrible pensée de Spiderman qui revient me hanter : « un grand pouvoir implique de grandes responsabilités. » L’isoloir est le lieu où il ne faut pas se tromper, au risque de passer 5 ans à se mordre les doigts.

J’ai peur de l’isoloir. J’ai peur de me tromper de candidat. De choisir celui qui dit ce qu’il fait, mais ne fait pas ce qu’il dit. Ou bien de choisir l’autre, celui qui dit ce qu’il fait et qui fait ce qu’il dit, mais ce n’est pas ce qu’il fallait faire.

Alors je doute, et me rappelle la formule de Kin Hubbard : « on aimerait voter pour le meilleur, mais il ne fait jamais partie des candidats ». Piqué au vif, je me raisonne : « si je réagis ainsi, alors je ne voterais jamais ». L’erreur de casting fait partie du jeu. Je peux me tromper, c’est le prix à payer. Le droit de vote c’est aussi le droit à l’erreur.

C’est un fait, voter n’exige pas d’avoir raison, juste d’avoir une opinion, et même une conviction si ça me chante. Le savoir est accessoire. En vérité il est même illusoire. On n’attend pas d’un électeur qu’il vote pour le bon candidat. Pour cela, il faudrait qu’il connaisse à l’avance la bonne route à suivre. Il lui suffirait alors de choisir le bon capitaine de navire. Mais non, on ne peut pas savoir, et à vrai dire on ne nous demande même pas de croire, juste de voter. « L’adulte ne croit pas au père noël, il vote », Pierre Desproges.

Et quand bien même il nous prenait l’envie de mûrir une profonde réflexion sur le sujet, il n’en sortirait aucune déduction qui tienne la route, que des conclusions bancales sur le monde idéal, la quête du Graal. D’ailleurs même les penseurs sachant penser nous livrent le même constat :
  • on ne peut pas déduire ce qui doit être de ce qui est.
  • ce qu’il faut être n’est pas contenu dans ce qui est.
Autrement dit, la bonne éthique ou morale à suivre ne sont pas cachées quelque part dans la nature. À nous de nous retrousser les manches pour en proposer une.

L’isoloir se mérite

C’est donc à moi de prendre mes responsabilités. Il faut que je sois à la hauteur de l’enjeu. L’isoloir se mérite. C’est pour cela que voter est un droit et pas un devoir. Il faut pouvoir assumer.

Puisqu’il faut y aller, j’ai peut-être trois arguments qui pourraient apaiser ma peur de l’isoloir :
  1. L’isoloir est ce rendez-vous unique où la règle ne vous est plus imposée, mais vous êtes en capacité de faire La règle. De l’hétéronomie à l’autonomie.
  2. L’enveloppe du bulletin de vote est une véritable bague de Gygès, qui vous rend invisible aux autres mais capable d’agir sur le reste du monde.
  3. Le bulletin de vote vous engage, ou pas. Dans le cas d’un vote blanc, il devient alors une phrase optative qui exprime un souhait du genre « que dieu nous aide ».
Et si vraiment ces trois arguments ne suffisent pas à apaiser ma peur de l’isoloir, alors je ferais un pas de côté, je regarderais du côté obscur, dans ces pays où l’isoloir est l’endroit où l’on peut voter pour le seul candidat en lice. Puis je prêterais l’oreille et me repasserais en boucle ce que disait le camarade Staline à ses ouailles :

« Ce qui compte ce n’est pas le vote, c’est comment on compte les votes. »

Brrr…

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