![]() Toutes les news c'est ici Contact
Abonner un(e) ami(e) Vous abonner Qui sommes nous ? |
15.01.2022 - N° 806
Tests covid : une ruée symptomatique de nos peurs
Par Pierre Robert Pierre Robert est agrégé de sciences économiques et sociales, ancien professeur de chaire supérieure/classes préparatoires aux grandes écoles. Auteur, conférencier, expert auprès de l'institut Sapiens, il est chef économiste du Laboratoire Industries & Cultures / EMDP-Paris II, membre du Collectif Art faber. Il est l'auteur de "Fâché comme un Français avec l'économie" paru chez Larousse en 2019. ![]() La frénésie des tests
covid est révélatrice de la panique générale
et de l'absence de stratégie gouvernementale. En France on teste aujourd’hui à tout-va. Le ministre de la Santé annonce que la barre des 12 millions de tests hebdomadaires serait très prochainement atteinte, un record dont se félicite son administration. Depuis le début de l’épidémie, six milliards d’euros d’argent public ont déjà été consacrés à ce poste de dépense qui fait la fortune des laboratoires mais dont on peut se demander à quoi il sert exactement. Ces chiffres sont à la mesure de la trouille intense qui s’est emparée de la société française, une sainte trouille alimentée par les média qui diffusent complaisamment les données anxiogènes livrées quotidiennement par les responsables de la santé publique : le taux de positivité franchit la barre des 20 %, le nombre de contaminations explose avec 368 149 cas confirmés le 11 janvier, il y a eu 347 entrées en soins critique le même jour, le taux d’incidence a progressé de 63,07 % entre le 1 et le 8 janvier et atteint un niveau record, et cela dans un pays dont 91,29 % de la population majeure est vaccinée… On s’affolerait pour moins que cela si on ne prenait pas aussi en compte le nombre des décès à l’hôpital qui semble être comme déconnecté du nombre de cas recensés : 204 par jour en moyenne le 11 janvier, soit une baisse de 8 % par rapport à la semaine précédente (contre plus de 1100 en avril 2020). Il faut aussi se demander qui meurt. Pour l’essentiel il s’agit de personnes âgées, de personnes obèses et de diabétiques. Mais les autres succombent très peu. En dépit de cela toute la France a peur et tous les Français indistinctement sont poussés au télétravail, à l’auto-confinement, à l’enfermement, et à la méfiance envers tout ce qui hier encore constituait la trame de la vie en société. L’erreur originelle L’épidémie est certes complexe à gérer mais comment en sommes-nous arrivés là ? L’erreur originelle est très probablement de ne pas avoir dès le départ ciblé les populations à risque, celles qui risquent de développer des formes graves de la maladie. Ce refus opposé dès le départ à la prise de mesures sélectives est une décision arrêtée au sein d’un tout petit comité, comme c’est l’usage dans notre système politique hyper centralisé. À ce tropisme très bien mis en lumière par le diagnostic d’Alain Peyrefitte sur Le Mal français se sont combinées d’autres tendances lourdes de notre société. Son penchant égalitariste incite à traiter tout le monde de la même façon, quelques que soient les caractéristiques souvent très différentes de chacun (« one size fits all » comme disent les économistes). La peur de stigmatiser a de même certainement joué dans un pays où un nombre considérable de citoyens se sentent facilement discriminés et où la grossophobie est presqu’un délit. À cela s’ajoutent à l’évidence des arrière-pensées politiques. Il ne faut surtout pas contrarier cette partie du corps électoral qui se rend aux urnes plus fréquemment que les autres et détient les clefs du suffrage. En surplomb pèse lourdement le principe de précaution qui incite l’administration à ne prendre aucun risque et la population à avoir peur de tout. Le dogme du tout vaccinal C’est cette décision fondatrice qui pousse aujourd’hui à tester à tout-va et à empiler des règles aussi changeantes que difficiles à appliquer à l’école, à l’université comme dans les entreprises. Mais à quoi sert ce testing massif et cette prolifération des normes de contrôle social ? Avant tout à asseoir la politique du tout vaccinal qui est devenue un dogme. Or pourquoi faudrait-il vacciner tous les enfants qui pour la plupart sont asymptomatiques ou simplement enrhumés et traiter de même l’ensemble de la population des moins de 50 ans qui très majoritairement n’est pas à risque ? La question se pose avec d’autant plus d’acuité qu’il est établi que le fait d’être vacciné n’empêche pas de transmettre le Sars-Cov-2. Une stratégie à repenser Aujourd’hui manifestement le variant delta est en bout de course, relevé par omicron nettement plus contagieux mais beaucoup moins nocif. On bascule donc vers un autre type d’épidémie qu’il faut envisager de traiter de la même manière que celle employée pour traiter la grippe depuis des décennies. Le temps des mesures massives qui mettent en difficulté toute la population et surtout les plus jeunes doit s’achever. L’enjeu est de retrouver un équilibre perdu entre protection collective, exagérément prise en compte, et liberté individuelle gravement compromise. Outre le maintien de mesures ciblées sur les populations à risque, la priorité devrait être de soigner le système hospitalier qui souffre de toutes sortes de pénuries et de restructurer la médecine de ville dont les carences surchargent les services d’urgence sommés d’accomplir les tâches que les praticiens libéraux n’assurent plus. Les six milliards d’euros partis plus ou moins en fumée pour tester aurait pu utilement y contribuer. Un début d’éclaircie En France l’épidémie écrase encore tout. Mais au Royaume-Uni on observe une embellie avec une baisse significative des cas. En Espagne se manifeste déjà une forte envie de tourner la page. On y cherche de nouvelles manières d’évaluer et de surveiller la pandémie. À la fin de la vague actuelle le gouvernement envisage de la rétrograder en maladie endémique et de la traiter comme on traite la grippe saisonnière. On doit accepter l’idée qu’on ne la vaincra pas totalement et qu’il faut apprendre à vivre avec elle comme on le fait pour bien d’autres pathologies. Dans un contexte où 50 % des Européens ont été en contact avec le virus, l’Agence Européenne des Médicaments (EMA) et l’OMS émettent de premiers signaux en faveur de ce changement de paradigme. Il est donc temps de s’y préparer avant que
notre économie surendettée,
notre société congestionnée et notre démocratie fragilisée ne subissent des dégâts irréversibles.
______________
|
||||
Qui
sommes-nous ? Nous écoutons, nous lisons, nous regardons... C'est parfois un peu ardu, et les news peuvent demander de l'attention. Mais elle sont souvent remarquables ! Nous vous proposons cet article afin d'élargir votre champ de réflexion et nourrir celle-ci. Cela ne signifie pas forcément que nous approuvions la vision développée ici. Nous ne sommes nullement engagés par les propos que l'auteur aurait pu tenir par ailleurs, et encore moins par ceux qu'il pourrait tenir dans le futur. Merci cependant de nous signaler par le formulaire de contact toute information concernant l'auteur qui pourrait nuire à sa réputation. Bien sûr, vos commentaires sont très attendus. ![]() |