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07.06.2020

Une fois n'est pas coutume...

Maquillage, accessoires… On refait sa déco intime



Par MAIA MAZAURETTE

Source : lemonde.fr

Comme les autres parties du corps, rien ne prédestine les organes génitaux à rester si sages ! La chroniqueuse de « la Matinale » Maïa Mazaurette fait le plein d’idées excentriques ou nature.

Souvenez-vous : il y a dix ans, le « vajazzle » entrait au (vaste) panthéon des tendances sexuelles de l’étrange. Pour les lectrices et lecteurs qui auraient raté le tsunami médiatique, il s’agissait de se coller des paillettes de strass sur le pubis (et plus si affinités), afin de transformer ce dernier en boule à facettes, en papillon, en message scintillant (« je t’aime, maman »), etc.

Anecdotique ? Pas si sûr ! Cette mode aussi chronophage que coûteuse concentrait toutes les injonctions faites aux femmes : non seulement le sexe devait être soigneusement surveillé (au cas où il se carapaterait, sait-on jamais), mais il fallait que ça brille.

Cependant. Avant de glousser sur les débordements du sexe à paillettes, déblayons devant notre propre salle de bains. En 2020, la déco intime reste d’actualité. Et elle reste genrée. Deux salles, deux ambiances : chez les femmes, on tire son inspiration du design scandinave, tandis que les hommes se rabattent plutôt sur le rustique-chic (je ne peux pas croire que je viens d’écrire cette phrase).

La plupart des femmes décorent en effet leur sexe « par le vide », à coups de nymphoplastie (réduction de la vulve), de blanchiment (pour unifier la couleur de la peau) et bien entendu d’épilation (plus ou moins intégrale). Pour rappel, les trois quarts des femmes s’épilent le maillot, dont 90 % des moins de 50 ans (Ifop/Elle, février 2019).

Côté pile, ces pratiques mettent les organes eux-mêmes en pleine lumière. Côté face, ils renforcent l’idée qu’un beau sexe féminin est aussi petit, lisse et uniforme que possible. Ce paradoxe révèle notre complexe relation au désir : se démarquer mais rester dans la norme, faire apparaître pour mieux faire disparaître (et inversement).

Pour les hommes, la mise en beauté du pénis et des testicules reste rare, soit que les démarches de séduction soient considérées comme non viriles, soit qu’elles paraissent ridicules car perdues d’avance (« de toute façon c’est moche »).

Cependant, rien ne prédestine nos sexes à rester si sages (pour les femmes) et si bruts de décoffrage (pour les hommes). Le marché de la décoration corporelle nous a habitués à plus d’excentricité ! Et même si les tabous entravent encore notre expression individuelle sous la ceinture, les options ne manquent pas.

Niveau débutant : teintures, perruques et bijoux érotiques

Les accessoires en forme d’organes génitaux sont prisés des fashionistas depuis une éternité, de la haute couture (chez Yves Saint-Laurent, les pénis se portent aux oreilles) jusque dans le militantisme (chez le Gang du clito, les clitoris se glissent autour du cou). Mais pourquoi ne pas faire « descendre » les bijoux au sexe, au lieu de faire « remonter » le sexe aux bijoux ?

Au rayon « made in France », nous avons Sylvie Monthulé, créatrice infatigable d’ornements délicats pour la vulve, de « cadres » pour le clitoris, de parures pour les seins, ou encore d’œufs pénétrants unisexes. Pas assez cru à votre goût ? Très bien. Pour les hommes et rien que les hommes, le créateur franco-britannique Julian Snelling propose depuis plus de quinze ans des œuvres souvent uniques, en bronze : plugs spectaculaires, cockrings et ballrings, bijoux pénétrants pour l’urètre, casques à pénis, etc. En cas de budget illimité (quelle chance), jetez également un œil du côté des créateurs d’art contemporain, comme Betony Vernon, exposée internationalement.

Si vous recherchez quelque chose de précis, adressez-vous soit à vos artisans locaux (qui seront ravis d’avoir du boulot), soit aux plates-formes pour artisans de type Etsy (dont l’offre en termes de cages de chasteté artistiques et de cotte de mailles pour pénis vaut son pesant de cacahuètes).

Si les bijoux vous laissent indifférents, pensez aussi aux teintures pour pubis (Minikini, Betty Beauty) qui couvrent les poils blancs et/ou vous permettent d’arborer une flamboyante forêt vierge bleue ou rose fluo. Vous pouvez également tenter la merkin, soit la perruque pubienne (vous passez un bon dimanche ?) : pour environ 50 euros, les toisons autoadhésives feront de vous un/e plagiste remarquable cet été à Juan-les-Pins.

Niveau intermédiaire : les tatouages

Selon Wikipédia, les humains s’encrent les parties génitales depuis le paléolithique : il ne s’agit donc pas d’une simple tendance. Bien sûr, se faire planter des aiguilles sous la peau de la vulve ou du pénis peut faire frissonner les âmes sensibles, mais 4 % des personnes tatouées ont pourtant choisi d’avoir un ou des tatouages intimes (Ifop/SNAT 2016). Parmi elles et eux, on trouve des passionnés, des esthètes, des curieux, des esclaves venus du monde du BDSM (« ce scrotum appartient à Maïa Mazaurette »), mais aussi des personnes venues se réapproprier une zone endommagée (comme lorsqu’on tatoue la poitrine après une mastectomie). Peur d’avoir mal ? Vous pourrez toujours vous rabattre sur les tatouages temporaires et les décalcomanies…

Niveau avancé : piercing, pearling et modifications

Comme le tatouage, nous parlons là de pratiques tribales, traditionnelles, remises au goût du jour. Je suis certaine que les plus douillets d’entre vous ont un avis parfaitement argumenté contre les modifications corporelles, mais, selon l’observatoire Cetelem/Harris Interactive, en 2018, 15 % des Français sont percés et 7 % aimeraient franchir le pas (ils sont respectivement 15 % et 16 % dans le cas du tatouage). Ces aventureux ne regrettent pas leur décision : presque quatre fois sur cinq, leur confiance et leur sensation d’attractivité ont augmenté.

Dans le cas du piercing, le pénis peut être percé au niveau du gland, du prépuce, du frein, de la base de la verge ou du scrotum. Les vulves peuvent être percées au niveau du clitoris ou des lèvres (rappel : le vagin est situé à l’intérieur). Le pubis et l’anus sont également concernés.

Outre l’intérêt esthétique, ces piercings sont souvent associés à un intérêt érotique, notamment ceux qui sont pratiqués sur le gland. C’est aussi le cas du pearling, qui consiste à poser des perles sous la peau (généralement la hampe du pénis), afin d’ajouter une sensation de texture à ses rapports sexuels.

Au-delà de ces classiques, certains adeptes de modifications corporelles utilisent le branding (la peau est brûlée), la scarification, ou encore l’élongation des organes génitaux (en utilisant des poids). Mais, bien sûr, l’imagination humaine est sans limites : on pourrait inclure dans cette catégorie la pose d’implants ou même la castration.

Mais à quoi bon ?

Lors du dernier sondage sur les Français et leur sexualité (Ifop/Charles, mars 2020), on a pu constater (à nouveau…) que la satisfaction sexuelle était corrélée à la satisfaction narcissique : ceux qui se trouvent beaux sont deux fois plus susceptibles d’être heureux au lit que ceux qui se trouvent laids. Notons que « se trouver séduisant/e » relève moins de la loterie génétique que de la méthode Coué : nous connaissons toutes et tous des personnes ravissantes qui se haïssent.

En l’occurrence, la décoration permet de reprendre un peu de contrôle sur une apparence dont les données essentielles nous échappent – tout en exprimant notre individualité, nos blessures, nos fantasmes peut-être. Décorer son sexe est loin d’être aussi frivole qu’on peut l’imaginer.

Même Rabelais

J’ai commencé cette chronique par un retour dans le passé proche. Laissez-moi maintenant vous transporter à la fin du XIVe siècle, lors de l’invention de la braguette : purement pratique au départ, elle devient peu à peu ornementale. Pour mettre en valeur le porteur (et le contenu) du pantalon, cette zone se pare et se rembourre, jusqu’à atteindre au XVIe siècle italien des proportions fantastiques, bien représentées dans la peinture d’époque (faute d’inspirer la mode du XXIe siècle).

En France, c’est à Rabelais que revient la palme de la décoration intime – via cette description de l’intimité du petit Gargantua, qu’« un chascun jour ses gouvernantes ornoyent de beaulx boucquets, de beaulx rubans, de belles fleurs, de beaulx flocquars ».

Nous sommes dimanche.
Irez-vous cueillir des fleurs dans les parcs et jardins,
irez-vous les enrubanner autour de vos parties génitales
et surtout, nous enverrez-vous les photos ?




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